référence : http://wwwsio.obspm.fr/commissions/cjc/arc/obsdoc/2002-09/msg00003.html
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[obsdoc] article jeunes chercheurs Yael FUCHS



	Bonjour,
	
	A cause des problemes de la liste obsdoc, le mail suivant a 
propos d'un article sur la situation des jeunes chercheurs en astro n'a 
pas pu etre diffuse par cette liste. Si vous l'avez deja recu par 
ailleurs je m'excuse de ces envois multiples.
	A titre de comparaison voici aussi en fichier attache un article 
paru dans le Courrier Cadres du 19 septembre 2002 concernant les 
docteurs en general, mais point de vue entreprise...
	
		Yael Fuchs
	
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	La Commission Jeunes Chercheurs (CJC) de l'Observatoire de Paris 
vous invite à lire, dans le numéro de septembre de la revue "Ciel et 
Espace", l'article intitulé "Le blues des docteurs". La journaliste Azar 
Khalatbari y décrit la situation des jeunes chercheurs en astrophysique 
à partir d'entretiens avec des chercheurs en place, des doctorants et 
des post-doctorants, dont des membres de la CJC qui ont essayé 
d'expliquer les problèmes et les demandes des jeunes chercheurs de façon 
représentative.
	 
	Nous souhaitons que cet article touche le plus grand nombre de 
personnes, afin de sensibiliser tous les chercheurs, débutants, 
permanents et responsables, à la précarité de la situation des 
doctorants et des post-doctorants.

	La CJC, Commission Jeunes Chercheurs de l'Observatoire de Paris.
Les "docteurs" trouvent leur voie en entreprise Anne-Isabelle Six
Courrier Cadres, 19 septembre 2002



   Les titulaires d'un doctorat ont longtemps été considérés comme des
professeurs Nimbus par les entreprises. Mais la méfiance s'estompe.
Témoigne de six "surdiplômés" qui ont trouvé leur voie dans le privé.

   « Ma casquette de chercheur m'a pénalisé. Aux yeux des recruteurs en
entreprise, j'étais un fonctionnaire à lunettes et en blouse blanche, un
surdiplômé incapable de mener un projet à bien en moins de six mois. »
Pendant longtemps, Salim Benmedakhene a cru qu'il pourrait faire carrière
dans la recherche académique. Seulement voilà, malgré son doctorat en
mécanique appliquée acoustique et matériaux, il ne réussit pas à
décrocher un poste de maître de conférences. Qu'à cela ne tienne, il
postule dans le privé, comme ingénieur. Las ! les préjugés des
industriels lui barrent la route. En 1999, c'est le déclic. Il découvre
sa vocation d'entrepreneur au cours d'un séminaire de sensibilisation
organisé par l'université de technologie de Compiègne (UTC), où il assure
une vacation. Salim Benmedakhene décide alors de monter un projet
d'entreprise pour appliquer le résultat de ses travaux sur le contrôle
par émissions acoustiques à la prévention des crashs aériens. Voici donc
notre scientifique de retour sur les bancs de l'école, en l'occurrence
HEC : « Devenir manager ne s'improvise pas, constate-t-il. L'état
d'esprit, le comportement, le jargon, n'ont rien à voir avec ceux du
monde de la recherche. »

   « Une révolution sans bruit »

   Son projet, deux fois lauréat du concours national de création
d'entreprises de technologies innovantes de l'Anvar (Agence nationale de
valorisation de la recherche), est retenu par l'incubateur de Picardie.
Fin septembre 2002, la chrysalide va enfin se métamorphoser en société
sous le nom d'AETech : Acoustic Emission Technologies.

   Ce parcours du combattant ne devrait plus être le lot des futurs
docteurs. Deux bonnes raisons à cela : d'abord, le vieillissement de la
pyramide des âges dans les organismes de recherche incitera sans doute
ces "mammouths" à ouvrir leurs portes.

   Ensuite, côté rapports docteurs-entreprises, tout plaide en faveur
d'une amélioration de la situation. Et pour cause : la loi sur
l'innovation de 1998 a jeté une passerelle entre ces deux univers
apparemment antinomiques que sont la recherche et l'entreprise. Elle a
d'une part favorisé la création d'entreprises innovantes, et d'autre part
amorcé un dégel du statut du chercheur. « La loi de 1998 a été une
révolution sans bruit, dit Gérard Grassy, délégué à la recherche et à la
technologie en Languedoc-Roussillon. Collaborer avec l'entreprise, aux
yeux des docteurs, ce n'est plus se salir les mains et les industriels ne
les regardent plus comme des professeurs Nimbus. Ce sont des
professionnels de haut niveau, aussi intéressants à embaucher que des
ingénieurs de grandes écoles. »

   Parole de fervent convaincu ! Car les préjugés ont la vie dure. La
preuve ? En quête d'un poste de chef de projet informatique, Marc Lejeune
a dû défendre bec et ongles son doctorat en informatique. « Les
employeurs ne reconnaissaient pas mon travail de thèse à sa juste valeur,
celle d'une expérience professionnelle, se souvient-t-il. J'ai dû
argumenter, rappeler qu'un thésard a des objectifs, qu'il est intégré
dans une équipe, qu'il est souvent confronté à l'échec, que sa méthode
lui permet d'appréhender plus facilement un sujet nouveau. » Marc Lejeune
a en effet effectué sa thèse sous forme de Cifre (convention industrielle
de formation par la recherche), qui permet aux jeunes doctorants de mener
à bien leur recherche en intégrant une entreprise, moyennant
rémunération. Son entreprise d'accueil a été l'Irsid, filiale R&D
d'Usinor à Metz (Moselle). Il avait un temps songé à anticiper sa sortie
de thèse un an avant la soutenance. « Il faut identifier ses forces et
ses faiblesses, recommande-t-il. Prendre le temps de définir son projet
professionnel et de tâter le terrain des entreprises. » Finalement, après
un passage dans une autre filiale d'Usinor, à Isbergues, dans le
Pas-de-Calais, il sera embauché par Cap Gemini Ernst & Young à Lille
(Nord), en février 2001, en tant qu'architecte de systèmes d'informations
pour de grands comptes. « Pendant ma thèse, j'avais travaillé sur
l'informatique de demain. Ça m'a donné une longueur d'avance »,
souligne-t-il.

     « Des moments de découragement »

   Serge Schaeffer, lui, n'a jamais connu d'autre employeur que la SNCF.
Fils de cheminot alsacien, entré aux chemins de fer à 16 ans, il gère
aujourd'hui, vingt-trois ans plus tard, les ressources humaines d'un
établissement de 750 agents de conduite près de Strasbourg. « Par goût
des études et désir de revanche sociale », il a fréquenté l'université en
dehors de ses heures de travail, jusqu'à devenir docteur en droit privé à
34 ans. Repéré par le doyen de Strasbourg III, il a bénéficié d'une des
premières Cifre en sciences sociales.

   SNCF, Usinor... Les Cifre ont longtemps été l'apanage de grands
groupes et de docteurs en sciences dites dures. Mais « la demande
d'éclairage en sociologie, sémiologie ou communication se fait de plus en
plus sentir dans les entreprises et les collectivités locales », nuance
Mathieu Brugidou, 41 ans, docteur en sciences politiques. Lui-même a
passé douze ans chez Infométrie, une PME rachetée par Ipsos Opinion,
d'abord en Cifre, puis comme directeur des études qualitatives. Depuis
1998, il est ingénieur-chercheur au Grets, la cellule de R&D d'EDF.
Spécialiste de l'analyse du discours et des représentations, et
professeur à Sciences Po Grenoble, Mathieu Brugidou conseille aux
aspirants Cifre de cumuler les stages pour « s'imprégner du langage des
entreprises et identifier les sujets qui les accrochent. »

    C'est au cours d'une enquête réalisée pour le cabinet BVA que
Catherine Janvier, doctorante en sociologie, a trouvé sa voie
professionnelle. En arpentant la cité de Chanteloup-les-Vignes
(Yvelines), elle rencontre le président du Comité français de secours aux
enfants, qui lui souffle l'idée de créer de l'emploi pour des jeunes peu
qualifiés en inventant le métier d'accompagnateur-révélateur de quartier.
« Au départ, je rêvais d'enseigner. Mais j'ai attrapé le virus du
développement local », dit Catherine Janvier. En 1999, elle crée
Belleville Insolite. L'association, dotée d'un budget de 300.000 euros,
emploie aujourd'hui dix jeunes qui font découvrir leur quartier aux
habitants de Belleville et aux touristes. Malgré un salaire mensuel de
1.220 euros et « des moments de découragement », elle s'épanouit. « Le
travail en association me convient. Je me sens libre », affirme la jeune
femme.

    Dans la tribu des bac + 8 minimum, les doctorants ne sont pas égaux.
Ceux qui ont jeté leur dévolu sur l'étude de la biologie en ont fait
l'amer constat. « Si 80 % des thésards en gestion obtiennent sans
difficulté un poste de maître de conférences, ils ne sont que 3 % en
biologie », affirme Alain Burlaud, professeur de comptabilité-gestion au
Cnam.

        « J'avais fait le deuil de mon domaine »

   A l'issue de son DEA en biologie moléculaire et cellulaire du végétal
à l'université de Toulouse, Karine Puget ne trouve pas de financement
pour effectuer une thèse. Pendant six mois, elle envoie des dizaines de
candidatures pour décrocher un stage, une bourse ou un poste dans
l'industrie pharmaceutique. Aucune réponse. « Seule, sans ordinateur,
j'ai vraiment déprimé », confie-t-elle. Malgré tout, elle garde contact
avec son réseau de copains d'études. L'un d'eux remarque une affiche dans
les locaux du CNRS à Montpellier. Elle propose une Cifre pour travailler
sur de nouveaux neuropeptides (peptides synthétisés dans les neurones qui
interviennent par exemple dans le traitement de la douleur). « Quand j'ai
postulé, j'avais déjà fait le deuil de mon domaine de prédilection, la
phytopathologie. Cette période difficile m'a appris la souplesse. Il faut
avoir l'esprit ouvert. » Trois ans plus tard, cette trentenaire encadre
une équipe de huit personnes, dont trois post-docs. Puis la jeune femme
monte son projet, intègre l'incubateur du Languedoc-Roussillon. Son
entreprise, Genepep (de génome et peptide), verra la jour dans quelques
semaines.

   Comme pour tous les demandeurs d'emploi, la clé de l'insertion des
docteurs réside souvent dans leur réseau. Pierre-Damien Berger, docteur
en opto-électronique, a forgé le sien dès sa seconde année de thèse, en
s'impliquant dans une association de doctorants et en organisant des
colloques consacrés au monde de l'industrie. « Un responsable de l'Insa
de Lyon m'a repéré. Quant Aratem, l'Agence Rhône-Alpes pour la maîtrise
des technologies de mesures, a cherché quelqu'un pour assurer l'interface
entre les laboratoires de recherche de la région et les industriels, il a
pensé à moi. »

      « Un salaire digne de ce nom »

   Au bout d'un an et demi, l'un de ses clients, fabricant de
semi-conducteurs, l'embauche à son tour pour monter des projets de
recherche et développement financés par l'Union européenne.

   Mais il arrive aussi que l'insertion professionnelle suppose une
reconversion radicale. Ce fut le cas pour Florent Bonnichon, 30 ans,
docteur en photochimie. « Je n'avais pas envie de jouer la surenchère de
stages, d'Ater (poste d'attaché temporaire d'enseignement et de
recherche) et de post-doc qui a mis au ban de la recherche publique et
privée un de mes amis, à 33 ans », explique le jeune homme. En 2000, il
profite donc de la vague de recrutements tous azimuts dans l'informatique
pour intégrer Unilog, à Paris, en tant qu'ingénieur études et
développement. L'ex-chimiste souligne les atouts de son poste : « Une
bonne formation, un salaire digne de ce nom et une véritable
reconnaissance professionnelle. » Seule anicroche : sa thèse n'est pas
valorisée comme un diplôme par son employeur. Preuve, s'il en fallait,
que les docteurs n'ont pas encore totalement apprivoisé les entreprises.


      « IL EXISTE D'AUTRES VOIES QUE LA RECHERCHE »

  Trois lettres en forme de code d'entrée dans le monde du travail pour
les docteurs. Née en 1980, ABG, l'Association Bernard Gregory, porte le
nom d'un physicien résolu à faciliter l'insertion professionnelle des
jeunes scientifiques. « Après trois ans passés dans un laboratoire, les
doctorants sont souvent coupés du monde, explique Marie-Gabrielle
Schweighofer, sa directrice. Nous leur montrons qu'il existe d'autres
carrières possibles que la recherche ou l'enseignement. »

   Présente dans 70 établissements d'enseignement supérieur et de
recherche, l'ABG aide les doctorants à finaliser leur projet
professionnel, à présenter leur thèse comme le ferait un manager en
entreprise, à réécrire leur CV... « Ils ne sont pas toujours conscients
que leur potentiel n'est pas seulement académique, regrette
Marie-Gabrielle Schweighofer. Ils peuvent mettre en valeur leur réseau,
leur capacité d'analyse, leur maîtrise de l'anglais... et leur
personnalité. »

   L'ABG s'est dotée d'un site (www.abg.asso.fr) sur lequel on trouve
tout sur les Cifre, les Doctoriales (des formations au monde de
l'entreprise) ou le "nouveau chapitre de la thèse", une sorte de bilan de
compétences que le doctorant présente à la fin de sa thèse. Autres atouts
: une banque de CV, des offres d'emploi – « dont la moitié émane de
PME » –, un répertoire international de sites utiles... Seul bémol
: ces services restent plus adaptés aux docteurs en sciences dites dures
qu'à leurs confrères des sciences sociales.


	CIFRE : LA CONVENTION À TROIS

   Préparer sa thèse en étant à la fois salarié d'une entreprise et
encadré par un laboratoire de recherche académique, c'est le principe de
la Cifre. Ces conventions industrielles de formation par la recherche,
gérées par l'ANRT (Association nationale de la recherche technique),
mènent souvent des labos à l'entreprise. A l'issue de leur thèse, la
plupart des bénéficiaires – 75 % – du dispositif trouvent un
emploi en entreprise, 1 % d'entre eux décident même de créer leur
société. Plus de 800 Cifre sont signées chaque année, dont la motié par
des PME. Depuis sa mise en place en 1981, ce dispositif a permis à plus
de 10.000 ingénieurs ou universitaires de conjuguer formation doctorale
et expérience professionnelle en percevant un salaire minimum de 20.215
euros par an. Les employeurs de ces thésards salariés perçoivent une
subvention de 14.635 euros. Evolution notoire : les entreprises sont de
plus en plus friandes de sujets de recherche en sciences sociales, qui
représentent 18 % des conventions.